La solitude

Toutes ces solitudes

Nous connaissons tous la solitude pour l’avoir vécue, seul ou à deux. Mais il existe tellement de solitudes autres que celle que l’on croit vivre parfois. Ici, il est question de la solitude des gens différents, différents de toutes les manières. Soit dans leur couleur, leur maladie rare et inconnue, dans leur handicap, etc.

Celle qui me hante le plus est la perte de la vision. La dégénérescence maculaire, tellement répandue, passe souvent presque inaperçue à nos regards, à nos yeux. La majorité des gens qui en sont atteints, le sont à l’âge de la vieillesse. La canne blanche est alors le dernier des recours pour se diriger. Avant de s’habituer à cette deuxième solitude, il y a plusieurs étapes à franchir. Après avoir tant donné, ce sens ne prévient pas de son éloignement. Les mots des lectures deviennent embrouillés, le regard se rapproche toujours, des libertés quittent peu à peu et parfois, le goût de boire pour oublier s'installe. Peut-on appeler cette étape de la vie une malchance de vivre? La vie n’est plus comme avant. Les activités s'en vont. Plusieurs deuils sont à faire. Et l’un des plus déchirants est la perte du permis de conduire.

Apprendre à s'organiser pour ne pas se faire organiser et rester vigilant prend beaucoup d'importance. Ce qui s'avère le plus difficile, dans ce processus, est la patience à acquérir malgré les embûches. Les tâches coutumières sont longues puisque la noirceur est toujours présente.

Écouter de la musique, regarder un poste de télé sans le voir. Imaginer des images pour accompagner les journalistes. Voir avec les yeux du cœur : cette petite phrase est devenue légendaire. Quand on sait voir les choses, on apprécie tout de chaque moment de la vie, puis on devient reconnaissant de pouvoir regarder de cette façon.

En vivant le moment présent, la facilité s’installe peu à peu: on évite les regrets, on évite de se sauver de la vie à vivre, on évite la tristesse qui sert d'échappatoire. Savoir admirer. Toucher anime la vue de l’intérieur car un peu de chaleur humaine réconforte toujours.

Continuer de se réaliser dans des expériences différentes et réinventer comment se débrouiller, un geste à la fois. Lentement oui, mais sûrement. Ne pas déranger à chaque besoin. Développer la débrouillardise, cette force, pour la faire sienne. Se rendre compte que l'écoute devient plus importante que la parole. Ce serait regrettable de ne pas se souvenir des images demeurées tout au fond de notre cœur, de notre mémoire. Le présage d’un soleil levant se prévoit la veille à son coucher.

CROIRE en la vie, en l’immensité de l’univers, au travail de la nature qui se renouvelle constamment, en son corps dont la création est mystérieuse, merveilleuse. Garder cet émerveillement toujours présent dans la vision profonde.

Alors, quel que soit le genre de solitude, la vivre avec sérénité, résilience et profiter des millions de petits bonheurs est à portée de main.

Angéline Viens - retraitée de l’enseignement - Manoir Brossard – Brossard - Québec - Canada - le 16 juillet 2022

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Les délices de la solitude


Une lueur rouge souligne l’horizon. Je ne saurais dire qui m’a réveillée. L’aube, à peine translucide, conçue de toutes les couleurs, pâlit le ciel qui se transforme peu à peu en perdant son manteau de noirceur. Je demeure quelques instants dans une sensation de rêve. Comme il est bon de goûter ces minutes de solitude volées à mon sommeil! Le ramage des oiseaux me fait sourire. Leurs notes innombrables fendent l’air d’une mélodie des plus harmonieuses.


La journée sera-t-elle bonne? Je n’ose me poser la question par crainte de gâcher ce doux moment. Mon lever me dévoile une maison sereine qui exhale son confort. La présence de ma solitude ne bouscule jamais le calme qui s’y est installé depuis de nombreuses années.


SOLITUDE, d’où viens-tu? Ou où vas-tu? Est-ce moi qui te conduis? Est-ce toi qui m’entraînes? Après tant d’années, tu demeures ma compagne de tous les jours, si facile à côtoyer, à vivre. Dès mon réveil, tu es présence inlassable, pleine de douceur. Le petit déjeuner en ta compagnie devient un havre de paix. Plus la journée avance, plus je me plais de ta bienfaisante assiduité. Mes heures de lecture, d’écriture, avec toi, se transforment en oasis dans le désert de mes habitudes. La marche, où tu participes à ma méditation devant les magnificences de la nature, me procure tant de plénitude en union avec l’univers.


Le soir venu, qu’il est doux de m’envelopper, devant la télé, d’une douillette et toi comme amie. Personne pour contredire le commentateur des nouvelles, si horribles soient-elles. Ensemble, nous acceptons la désespérante situation en rendant grâce des bienfaits reçus. Quand vient la brunante, cette visiteuse assidue de tous les jours, nous l’accueillons avec joie en remerciant le ciel de ce tableau féérique, qui, à chaque soir, rivalise des teintes les plus variées, prêtées par la nature.


Puis, à l’heure du coucher, chère solitude, tu me rassures d’une sécurité confiante malgré tous les aléas possibles. Sois la bienvenue chez moi où je t’attribue la très grande tâche de gardienne de la paix. Avec toi, je suis à l’endroit le plus sûr du monde.

Angéline Viens - retraitée de l'enseignement - lauréate d'un prix littéraire en 2007 - Brossard - 9 octobre 2021

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La solitude absolue du Je


Il y a un dicton qui dit que nous venons au monde seul et que nous mourrons seul. Je crois que nous le sommes aussi tout au long de notre vie, étant la seule personne à savoir ce qui se passe dans notre tête.


Cependant, il faut faire une différence entre solitude et isolement. La nuance est réelle et significative. La solitude peut-être choisie, l’isolement l’est rarement. De ce dernier, je n’ai qu’une conception théorique. Et pour vous en donner une description juste, et en dire tous les impacts sur la santé physique et mentale, il me faudrait l'avoir vécu.


Tandis qu'écrire sur ma solitude m'est facile. Je m’y sens bien, je ne m’y sens jamais seule. Les moments de solitude que je m’accorde s’avèrent particulièrement nourrissants et enrichissants. La solitude choisie est un état d’esprit, elle fait partie de ce que je suis; cela ne veut pas dire que je n’aime pas la compagnie des gens.


La solitude impose de vivre face à face avec sa propre personne. Quand on a réglé ses problèmes et anéanti tous ses vieux démons, être seul est énormément bénéfique, c’est une source d’épanouissement personnel. Pour ce faire, il faut avoir une certaine estime de soi. Parfois, c’est aussi une manière d’établir une distance saine vis-à-vis de ce qui ne nous convient pas, de ce qui nous trouble, nous gêne ou altère notre paix intérieure.


Il y a de plus en plus de personnes qui vivent seules. Si elles n’apprivoisent pas leur solitude, elles finissent par avoir de gros problèmes de santé physique et mentale. Étant seule et heureuse de l’être, je prends ainsi l’entière responsabilité de mon bien-être. Pour moi, vivre seule, c’est la liberté, la paix intérieure et le simple plaisir d’être. J’ai remarqué que j’ai davantage opté pour la solitude après que mes trois grandes amies soient parties. Mais, elles restent toujours présentes dans mes pensées.


Dans le moment présent où j’écris ceci, je suis, étant bien consciente qu’un jour, je ne serai plus.


Lorraine Charbonneau - retraitée de la fonction publique fédérale – résidence Le Marronnier - Laval – Québec - le 12 juillet 2021

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